L'abbaye du Mont Saint-Michel
Partez à la découverte d’une des merveilles de l’architecture moyenâgeuse.
Le Grand Projet du
Mont Saint-Michel
(Texte issu du livre "Les Carnets de cuisine de La Mère Poulard au Mont Saint-Michel depuis 1888". Auteur : Eric Vannier).
« La nature contrariée
L’homme, souvent, contrarie la nature. Au xixe siècle, la priorité des hommes était de nourrir les populations. Des spécialistes hollandais de la poldérisation (la conquête des terres sur la mer) constatèrent que la baie du Mont-Saint-Michel se prêtait parfaitement à cette opération.
Les terres reconquises sur la mer étaient en effet particulièrement riches en sédiments naturels qui s’y étaient accumulés au cours des millénaires et les rendaient fertiles.
Une partie de la baie fut ainsi poldérisée avec la construction de digues, pour isoler ces terres de la mer. S’ajouta à cela, à la fin du siècle, la construction de la digue route qui relie le Mont-Saint-Michel à la terre. Des barrages furent ensuite édifiés sur les rivières côtières.
Cet ensemble d’ouvrages empêcha la baie d’être balayée, comme autrefois, par les courants marins et par les chasses d’eau naturelles que constituent les trois rivières qui se jettent dans la baie : le Couesnon, la Sée et la Sélune.
Le Mont en danger
Ces modifications fondamentales de la baie eurent pour conséquence une accélération de l’ensablement du Mont-Saint-Michel. Chaque année, les marées apportent en effet un million de mètres cubes de sédiments. La plupart de ces sédiments sont naturellement emportés par les courants marins, puis chassés par les rivières qui balaient la baie à marée basse. Privé de ces chasses d’eau naturelles, le Mont-Saint-Michel connut alors un phénomène d’ensablement avec un rehaussement du niveau général de la baie, qui rendit de plus en plus difficile la montée des eaux et accéléra la colonisation des grèves par la végétation. Si rien n’avait été fait, le Mont-Saint-Michel aurait été peu à peu absorbé par le continent.
Depuis près d’un demi-siècle, plusieurs tentatives d’aménagement des berges du Couesnon, puis de construction d’ouvrages, ont été initiées dans la baie. En 1969, on essaya de stopper les inondations provoquées par les marées, qui remontaient jusque dans le lit du Couesnon, ce qui eut pour effet d’accélérer l’ensablement de la baie, la mer apportant toujours plus de sédiments que la végétation recouvrait peu à peu. Le Mont-Saint-Michel risquait de perdre rapidement son caractère insulaire.
Le grand projet du Mont-Saint-Michel
En 1995, un grand projet fut mis en œuvre : il permit à la mer et aux rivières de reconquérir la baie, cela afin de remettre le Mont-Saint-Michel au milieu des eaux. Un barrage chasse-marée fut construit pour donner encore plus de puissance à la rivière Couesnon dans son rôle d’immense chasse d’eau de la baie.
Depuis 2009, le barrage est ouvert au public et libre d’accès. Il comporte de multiples vannes permettant de décanter les sédiments avant de relâcher l’eau. Il assure aussi la préservation des espèces, grâce à deux passes à poissons. Des bassins naturels creusés en amont pour augmenter les capacités de stockage d’eau de la rivière Couesnon en ont accentué l’action et une passerelle remplaça la digue route, laissant les courants marins divaguer autour du Mont-Saint-Michel. Un système de navettes fut également mis en place depuis le continent, afin d’éviter l’encombrement des voitures, auparavant garées au pied du Mont, et de dégager la vue.
Le grand projet de rétablissement du caractère maritime du Mont-Saint-Michel s’est achevé à l’automne 2015 avec l’inauguration des différents ouvrages par le président de la République François Hollande. Le Mont-Saint-Michel redevint une île. »